Parce qu’il est relié au nom de marque, parce qu’il reste irremplaçable 30 ans après sa disparition, nous avons décidé d’écrire un article sur Serge Gainsbourg.
S’il est un auteur qui a compris l’immense valeur des noms de marques et qui a su les utiliser, c’est bien lui.
Gainsbourg a inséré les marques dans ses chansons, parfois en vedette et il a par ailleurs inspiré la création de noms par sa personnalité et son œuvre.
Gainsbourg et les noms de marques
Derrière un Kleenex je saurais mieux comment te dire adieu.
Tu n’es qu’un fumeur de Gitanes...
En intégrant largement les noms de marques à ses chansons, Gainsbourg les a libérés, sortis de leur carcan conventionnel, inscrits dans le patrimoine culturel et anoblis.
Ce faisant, il a facilité leur utilisation dans le vocabulaire courant. On dit aujourd’hui : as-tu vu mes Ray-Ban, j’ai perdu mon Navigo… Il est tendance de parler ainsi : les noms de marques ont détrôné les termes exacts du dictionnaire, ils ne renvoient pas à une catégorie mais à un style, ils valorisent le locuteur.
Très tôt Gainsbourg a compris le potentiel d‘émotion et d’évocation d’un nom de marque qu’il désigne un produit de luxe ou un produit de tous les jours. Très tôt il a rebondi sur ses noms, leur univers, avec des rimes, des histoires...
Gainsbourg a repris aussi dans ses chansons de nombreux noms de pop stars, ces noms fonctionnent finalement comme des noms de marque :
Disparu Brian Jones, Jim Morrison, Eddy Cochrane, Buddy Holly… Idem Jimmy Hendrix etc.
17 noms sont cités dans la chanson Ex-fan des Sixties.
Pour cet inventaire de noms, il a probablement dû envisager des dizaines de noms possibles.
Or s’il existe une profession qui manie en permanence des listes énormes de noms c’est bien la nôtre. Personnellement chaque année je découvre, sélectionne ou filtre juridiquement plus de 10 000 noms…
A travers les marques citées, Gainsbourg convoquait des images, des univers, des fantasmes, toutes ces évocations dont nous explorons le potentiel dans nos évaluations de noms.
La création de noms : émotions et évocations d’abord
Gainsbourg a accompagné notre métier de créateur de noms.
- il aimait la BD et les onomatopées cf SHEBAM ! POW ! BLOP ! WIZZZZZ ! (chanson Comic Strip). Les onomatopées existaient depuis longtemps dans l’univers des marques cf Crunch, Pif ou Pschitt mais il fallait les renouveler. Sont apparus Yop, Waouh, , Plizz, Pluzz, Blablacar …
- il utilisait souvent les lettres du bout de l’alphabet : W, X, Y, Z… Ces lettres, dont certaines sont rares en français, sont montées en puissance dans les noms de marque cf Axa, Dexia, Wanadoo ou plus récemment Yuka, Zoé, Yaos… Notre époque s’est emparée de ces lettres qui expriment bien la nouveauté, la vitesse, la modernité.
- il s’appuyait souvent sur un prénom cf Elisa, Marilou, Laetitia, Johnny Jane … En naming les prénoms, inventés ou existants, forment une tendance forte cf Clio, Mégane, Hugo (Boss), Coco (Chanel), Dexter ou plus récemment Michel et Augustin, Engie, Uber, Bibi, Eliot… Le prénom est intéressant car il rapproche à la fois de l’émetteur et du produit.
- il faisait feu de tout bois, mix et match génial de poésies de Verlaine, de jeu de mots, d’anglais branché comme le font nos créatifs-noms qui balayent tous les référentiels d’idées possibles.
Conclusion
Gainsbourg peut choquer sur le plan des mœurs mais il faut se rappeler qu’il a vécu à la fois la dernière guerre et les années 68.
Précurseur, avant-gardiste, il a sans doute été le premier à utiliser largement les noms de marques dans ses chansons. Il a su capter les émotions et convoquer les univers fantasmatiques des noms de marques qu’il utilisait.
Il reste un artiste et parolier unique, hyper doué, profondément humain dont beaucoup de textes n’ont pas pris une ride et continuent d’inspirer aujourd’hui les song writers et les namers.